1 janvier 2001

Exemples de plaintes reçues durant l'année 2001-2002

Plainte 1

Le plaignant, qui était un père de famille non représenté dans des poursuites relevant du droit de la famille, a reproché au juge d'avoir rejeté injustement la demande qu'il avait présentée en vue de faire modifier une ordonnance de garde et d'accès antérieure et de s'être fâché contre lui. Il « estimait qu'il avait probablement » été victime de discrimination en raison de sa race, de sa couleur, de son sexe et du fait qu'il se représentait lui-même.

Le plaignant a été avisé qu'un examen attentif de l'affaire n'avait révélé aucun fait permettant de dire que la conduite du juge ou le rejet de la demande qu'il avait déposée constituait une preuve de discrimination. Le juge a plutôt rejeté la demande parce qu'il estimait que celle-ci constituait une tentative visant à faire instruire à nouveau une question qui avait déjà été tranchée au moyen d'une ordonnance provisoire. Le juge a souligné que le dossier de la demande dont il avait été saisi ne comportait pas la moindre allusion à la demande ou au résultat de la demande présentée entre-temps en vue d'obtenir l'autorisation d'interjeter appel de la même ordonnance, que le plaignant tentait à nouveau de faire réexaminer. Le juge a ajouté qu'il s'excusait si toutefois le plaignant estimait qu'il avait semblé irrité.

Plainte 2

Le plaignant a allégué que les commentaires que la juge avait formulés contre les hommes au cours d'une émission de télévision avaient pour effet de miner la perception du public au sujet de l'impartialité des juges. Selon le plaignant, la juge aurait « déclaré que les pères ne s'occupent pas de leurs enfants et qu'ils n'ont pas été de 'bons pères' avant le divorce ». Le plaignant a ajouté qu'il « ne savait pas » comment la juge se prononcerait dans un cas particulier portant sur des questions liées à la garde, mais il a précisé qu'il n'aimerait pas que la juge entende une affaire où ses enfants ou lui-même seraient en cause.

Le plaignant a été avisé qu'un examen de l'entrevue enregistrée sur bande vidéo révélait que la juge n'avait pas employé les mots reprochés. Il a été informé que les commentaires effectivement formulés n'avaient pas mis en cause tous les pères et qu'une personne renseignée  qui aurait examiné la question de manière réaliste et pratique et y aurait réfléchi n'aurait pas craint un manque d'impartialité quant à la capacité ultérieure de la juge de trancher les questions liées à la garde dans des causes de divorce ou de séparation. De plus, le plaignant a été avisé que les juges peuvent s'exprimer franchement afin de permettre au public de mieux comprendre leur rôle. Dans l'affaire en question, la juge avait débuté ses commentaires au sujet du rôle du juge dans les litiges concernant la garde en disant que les enfants avaient besoin à la fois de leur père et de leur mère. Le plaignant a été avisé qu'il appartenait à la partie qui reproche à un juge d'être partial dans un cas donné de demander la récusation de ce juge.

Plainte 3

Un plaignant non représenté dans une affaire relevant du droit de la famille a allégué que la juge avait des préjugés contre les hommes et qu'elle n'avait pas contrôlé les attaques dont il avait été victime de la part de l'avocat de la partie adverse. Le plaignant a ajouté qu'il s'était senti « humilié, harcelé et bâillonné » pendant l'audience et a demandé une enquête.

Le plaignant a été avisé que, d'après l'enregistrement de l'audience, la juge avait donné au plaignant toutes les chances voulues de prouver sa cause, qu'elle lui avait expliqué la procédure à suivre et avait écouté patiemment le témoignage qu'il avait présenté, ainsi que les arguments qu'il avait invoqués. Les bandes sonores indiquaient que la juge s'était montrée polie et respectueuse à l'endroit de toutes les parties tout au long de l'instance et qu'elle avait patiemment expliqué les procédures. Le plaignant a également été informé que la juge a semblé avoir contrôlé efficacement le déroulement de l'instance, malgré la rivalité évidente entre le plaignant et l'avocat de la défenderesse.

Plainte 4

Un plaignant dans un litige relevant du droit de la famille a reproché à la juge d'avoir des préjugés contre lui, compte tenu des décisions défavorables qu'elle avait rendues à son égard, d'avoir fait montre de favoritisme à l'endroit des femmes et d'entretenir des préjugés contre les hommes. Le plaignant était en désaccord avec certaines décisions concernant les aliments et les arrérages, notamment avec le refus de la juge d'ordonner la communication préalable de certains renseignements et documents.

Le plaignant a été avisé qu'il n'avait présenté aucune preuve à l'appui de son allégation de partialité, exception faite des décisions défavorables de la juge. La transcription de l'audience a révélé que la juge avait traité les deux parties sur un pied d'égalité.

Plainte 5

Un plaignant dans une instance de divorce a allégué que le juge avait commis des erreurs de droit et de fait dans son jugement. Le plaignant a dit qu'il avait été pénalisé par son assureur parce que le juge avait conclu qu'il avait causé des dommages à la voiture de sa femme. Il a demandé une révision du dossier, alléguant que le juge était partial et avait commis un acte de « pure discrimination » en excluant du partage du patrimoine familial un certain montant d'argent que sa femme avait reçu.

Le plaignant a été avisé du mandat du Conseil et de son droit d'appel. Il a été informé que ses allégations de partialité et de discrimination visaient les conclusions que le juge avait formulées dans son jugement et ne pouvaient donc être examinées que par voie d'appel. L'intervention du Conseil en vertu de la Loi sur les juges n'était pas justifiée dans cette affaire.

Plainte 6

Un plaignant qui avait été présent au cours d'une audience relative à un litige relevant du droit de la famille, mais qui n'était pas partie au litige, a allégué que les motifs du jugement du juge démontraient que celui-ci avait un préjugé défavorable à l'endroit des hommes, compte tenu des conclusions auxquelles il en était arrivé au sujet des aliments et des biens familiaux nets. Il a dit que le juge avait tenu « une réunion secrète » avec les avocats des parties à l'extérieur de la salle d'audience. Il a contesté le refus de la part de l'avocat de l'époux de lui dire ce qui s'était passé au cours de la réunion. Il a également reproché au juge d'avoir créé sciemment ou délibérément une situation qui lui donnait la possibilité de rencontrer seul l'avocat de l'épouse en empruntant l'ascenseur en même temps que celle-ci et l'avocat en question, avec lequel le juge a certainement dû tenir une rencontre secrète.

Le plaignant a été avisé qu'il n'est pas irrégulier de la part du juge de première instance de rencontrer les parties en privé avant ou pendant l'instruction dans une affaire civile. Le juge peut le faire pour différentes raisons, notamment pour vérifier si les parties se sont entendues sur des faits et si des points litigieux ont été réglés avant ou pendant l'instruction. Si le juge a rencontré les avocats, ce n'était pas irrégulier et il n'y avait aucune raison pour laquelle le plaignant, qui n'était pas partie à l'instance, devrait être mis au courant de la teneur des discussions. Même si le juge s'est retrouvé dans le même ascenseur que l'épouse et l'avocat de celle-ci, il n'en demeure pas moins que la conclusion du plaignant selon laquelle ils ont tenu une réunion secrète était une pure supposition.

Plainte 7

La plaignante dans une cause relevant du droit de la famille a allégué que la juge était en

situation de conflit d'intérêts, en raison des liens professionnels qu'elle avait eus avec la

personne qui devait témoigner comme témoin expert et du fait qu'elle avait été associée avec un

avocat que la plaignante avait connu brièvement ainsi qu'en raison de la nature du travail du

conjoint de la juge.

La plaignante a été avisée que la décision de la juge d'ajourner l'affaire ne pouvait être révisée que par voie d'appel et que l'allégation de conflit d'intérêts avait été examinée en bonne et due forme. Dès que la juge a été avisée du nom de l'expert qui avait rédigé le rapport que l'avocat de la plaignante cherchait à déposer, elle a demandé aux parties si elles souhaitaient qu'elle se récuse, étant donné qu'elle avait déjà eu des liens professionnels avec l'expert en question. La plaignante a été avisée que, de ce fait, tout conflit d'intérêts réel ou perçu avait été réglé en bonne et due forme et que son allégation était sans fondement.

Plainte 8

La fille de la défenderesse, qui avait été poursuivie dans une affaire de quasi-contrat, a allégué

que le juge était en situation de conflit d'intérêts, parce qu'il avait exercé le droit au sein du

même cabinet que l'avocat de la partie demanderesse. De l'avis de la plaignante, le juge aurait

également dû s'assurer qu'une personne était présente à l'audience pour représenter sa mère et

veiller à ce que les bonnes personnes soient appelées à témoigner.

La plaignante a été avisée que le juge avait été désigné à ce titre 15 ans avant l'instruction et qu'il n'était pas en situation de conflit d'intérêts. Elle a aussi été informée qu'il incombait à l'avocat de sa mère, et non au juge, de veiller à ce qu'une personne représentant celle-ci soit présente au cours de l'instruction. Il appartenait également à l'avocat de s'assurer que les bons témoins seraient appelés.

Plainte 9

Un plaignant dans un litige concernant les aliments et la répartition des biens familiaux a allégué que la juge n'était pas impartiale, parce qu'elle était une amie de la cousine de son ex-épouse. Il a produit une photographie qui avait été prise entre la date de l'instruction et la date du prononcé du jugement et sur laquelle figuraient la juge en compagnie de ladite cousine à une fête. Il a ajouté qu'il avait appris que certaines personnes présentes à la fête avaient discuté de sa cause et qu'elles avaient parlé de la juge comme la juge qui avait présidé l'instruction en question.

La juge a nié être au courant de la relation entre son amie et l'ex-épouse du plaignant ou avoir discuté de la cause avec une personne qui se trouvait à la fête ou avec qui que ce soit à l'extérieur de la salle d'audience avant de rendre une décision. Le plaignant a été avisé qu'il n'avait présenté aucun élément de preuve indiquant que la juge avait participé, lors de la fête, à des discussions concernant l'affaire ou qu'elle était au courant, avant de rendre une décision, de la relation qui existait entre la cousine et l'ex-épouse. L'avocat du plaignant n'avait pas soulevé la partialité comme moyen d'appel. Les motifs du jugement étaient détaillés et judicieux et comportaient une description complète des éléments de preuve et des règles de droit applicables. La décision de la juge avait été confirmée en appel.

Plainte 10

Un plaignant dans un litige relevant du droit de la famille a reproché au juge de s'être trouvé en situation de conflit d'intérêts, parce que sa conjointe était une amie intime de la demanderesse et lui avait parlé fréquemment au cours de l'audience. De plus, le frère du demandeur, qui a témoigné à l'instruction, était un ami du juge. Le plaignant a demandé que le jugement soit « abrogé »

Des explications ont été demandées au juge et le plaignant a été avisé du mandat du Conseil. Il a également été informé que, d'après la preuve, l'épouse du juge ne connaissait pas la demanderesse au moment de l'audience et qu'elle l'avait rencontrée quelque sept mois après le prononcé du jugement. De plus, l'allégation selon laquelle le juge et le frère de la demanderesse étaient des amis n'était pas fondée. Par conséquent, il n'y avait aucune raison justifiant l'intervention du Conseil dans le cadre de la mission dont il est investi en vertu de la Loi sur les juges.

Plainte 11

Un médecin qui avait présenté une demande d'injonction dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire relative à des mesures disciplinaires prises contre lui était en désaccord avec certains aspects des motifs de la décision de la juge. Il a mentionné que la juge doit connaître le principal plaignant qui avait déposé une plainte de harcèlement contre lui dans les procédures disciplinaires puisqu'il avait « déterminé » que « tous deux étaient parents d'enfants qui fréquentaient la même école », ce qui, à son avis, soulevait une crainte raisonnable de partialité.

La juge a dit qu'elle ne connaissait pas l'homme qui avait déposé une plainte dans les procédures disciplinaires et qu'elle n'avait jamais entendu parler de cet individu. Le plaignant n'avait présenté aucun élément de preuve au soutien de son allégation. Les motifs du jugement par lesquels la juge a rejeté la demande d'injonction étaient détaillés et judicieux. Le plaignant a été avisé qu'il n'y avait aucune preuve de partialité et, par conséquent, aucun motif justifiant une intervention plus poussée de la part du Conseil. Le plaignant a réécrit pour se plaindre de la façon dont le Conseil avait traité sa plainte. Il a été informé qu'il n'avait présenté aucun élément de preuve justifiant la réouverture du dossier.

Plainte 12

Un plaignant a soutenu que le juge l'avait traité différemment en raison de sa race, parce qu'il avait déclaré qu'il était le père d'un enfant « sans test sanguin et sans avis » et lui avait ordonné de verser des aliments, ce que le plaignant n'avait pas les moyens de faire. Il a ajouté qu'il avait dû recourir à l'aide sociale par suite de cette décision et qu'il demandait une enquête.

Dans sa réponse, le Conseil a mentionné que le plaignant avait interjeté appel de l'ordonnance, même s'il n'avait pas eu gain de cause en dernier ressort. Le juge a souligné que l'audience, qui avait eu lieu à la demande de la province, avait été reportée deux fois afin que le plaignant ait la possibilité de passer un test sanguin et de consulter un avocat, ce qu'il n'a pas fait. Le juge a souligné que ce n'est qu'au cours de la troisième audience qu'une déclaration de paternité a été faite, au vu de la preuve, et qu'une ordonnance alimentaire en faveur de l'enfant a été rendue. Le plaignant s'est fait rappeler que, malgré d'autres procédures visant à exécuter l'ordonnance, il n'avait payé aucun montant au titre des aliments et qu'il n'y avait aucun élément de preuve indiquant qu'il avait été traité différemment en raison de sa race.

Plainte 13

La plaignante était la mère de deux enfants au sujet desquels la Société d'aide à l'enfance avait présenté une demande de tutelle sans droits de visite. La plaignante a soutenu que le juge avait accordé la tutelle à la Couronne parce qu'elle est Métisse. Elle a ajouté que le juge n'avait pas le droit de dire que j'avais des problèmes étant donné que j'étais Métisse ».

Un examen des motifs de la décision du juge ainsi que de la transcription de l'instruction n'a pas permis de confirmer les allégations de la plaignante. Le juge avait rendu une ordonnance visant à reconnaître les préoccupations d'ordre culturel de la plaignante.

 

Plainte 14

Le plaignant dans une instance de divorce a allégué qu'il avait été lésé par le retard du juge à rendre son jugement final. Il avait déjà interjeté appel du premier jugement du juge et attendait encore le jugement final. Il s'est plaint du fait que le juge avait rejeté sa demande de récusation.

Des explications ont été demandées au juge. Le plaignant a été avisé de son droit d'appel et du mandat du Conseil. Il a également été informé que le juge n'avait pas dépassé le délai de six mois que la loi prévoit normalement et que le Conseil recommande comme délai relatif au prononcé des jugements, étant donné qu'il avait, dans son premier jugement, différé sa décision concernant les mesures  accessoires afin de permettre aux parties de vérifier certains renseignements au sujet, notamment, de l'actif de retraite immobilisé du défendeur.

Plainte 15

La demanderesse dans une cause de divorce a soutenu que le juge avait mis trop de temps à rendre son jugement et à lui accorder le divorce. Le retard lui causait des problèmes, parce qu'elle voulait se remarier. Elle se sentait « très frustrée par l'appareil judiciaire, qui est censé m'aider et non me nuire ». Elle estimait qu'elle avait été « attaquée » parce qu'elle se représentait elle-même et parce qu'elle « avait retenu les services d'un technicien juridique pour faire ses travaux d'écritures ».

La plaignante a été avisée qu'un délai de quatre mois entre la comparution devant la Cour et le jugement faisant droit à la demande de divorce ne constituait pas un délai déraisonnable, qu'il était même inférieur à la norme reconnue de six mois et ne soulevait aucun problème de conduite. Même si la demande de divorce de la plaignante n'était pas contestée, l'affaire était compliquée du fait qu'elle avait décidé de recourir à l'aide d'un technicien juridique qui, de l'avis du juge, avait représenté la plaignante d'une manière allant à l'encontre des règles applicables en matière de droit de la famille. La plaignante a également été informée qu'au cours de l'audience, elle a répondu « non » lorsque le juge lui a demandé s'il y avait urgence dans cette affaire.

Plainte 16

Un homme qui était partie à différentes actions en justice, appels et demandes de contrôle judiciaire non réglés s'est plaint des remarques qu'ont formulées ou citées quatre juges différents, dont l'un était membre du Conseil, dans les décisions qu'ils ont rendues et selon lesquelles il a été considéré comme un profane. Il a soutenu que ces commentaires traduisaient des préjugés à l'endroit des parties non représentées par un avocat et constituaient des « attaques personnelles » contre lui et contre toutes les parties non représentées par un avocat. À son avis, leurs remarques étaient « abaissantes, humiliantes et blessantes » à son endroit et ont été utilisées dans un but vindicatif afin de l'empêcher d'obtenir des réparations dans certains cas. Le plaignant a aussi déploré le fait que la presse avait répété ces commentaires et que deux des juges avaient formulé des remarques à la presse au sujet des parties non représentées par un avocat.

Le plaignant a été avisé que les commentaires des juges ne constituaient pas des remarques gratuites ou des attaques personnelles à son endroit ou à l'endroit de l'ensemble des parties qui ne sont pas représentées par un avocat. Dans chaque cas, les commentaires étaient liés aux conclusions du juge concernant les procédures que le plaignant avait engagées et la façon dont il avait procédé pour présenter le fond de sa cause ou pour débattre la question des dépens. Le plaignant a été avisé que les poursuites judiciaires sont des questions de nature publique et que le résultat des litiges est souvent susceptible de retenir l'attention des médias qui, à leur tour, donnent un compte rendu des questions qui, à leur avis, intéressent le public. Les parties aux litiges devraient être conscientes de la publicité pouvant entourer les actions en justice qu'elles engagent ou contestent.

Plainte 17

Plus de cinq ans après que le jugement a été rendu dans une action en bornage, la partie défenderesse a allégué que le juge avait commis une erreur de fait et de droit et avait porté atteinte à sa réputation dans son jugement. Il a dit que le juge voulait « régler une affaire de politique », car lui-même et le juge avaient déjà été candidats à des élections en même temps. Il a demandé au Conseil de « corriger ou d'annuler » le jugement.

Le plaignant a été informé du mandat du Conseil et du fait qu'il aurait pu se prévaloir de son droit d'appel en 1996. Il a aussi été avisé que son allégation selon laquelle le juge avait rendu une décision défavorable parce qu'il voulait régler une affaire de politique ne pouvait être retenue. Le fait que le juge et lui auraient tous deux été candidats à la même époque à des élections qui remontent à plus de 20 ans ne suffisait pas à convertir sa déception quant au jugement en une question de déontologie judiciaire.

Plainte 18

Le chef d'une Première nation s'est plaint du fait que l'emploi des mots « peuples conquis » dans une allocution prononcée par un juge en chef créait une « crainte de partialité » en ce qui concerne les questions liées aux droits ancestraux et aux droits issus de traités, car la perception selon laquelle les peuples autochtones du Canada avaient été « conquis » était inexacte. Il a demandé au Conseil d'intervenir immédiatement afin de révoquer le juge.

Le juge en chef a souligné qu'une lecture de l'ensemble de l'allocution indiquait qu'il n'a jamais eu l'intention de sous-entendre que les peuples autochtones du Canada avaient été « conquis ». Les mots « peuples conquis » ont été utilisés dans la description générale de la politique coloniale britannique et ne visaient nullement à sous-entendre que les peuples autochtones du Canada avaient eux-mêmes été conquis. Le juge en chef regrettait tout malentendu que ces remarques ont pu créer. Le plaignant a été avisé que l'allégation de crainte de partialité découlant des remarques en question n'était nullement justifiée.

Plainte 19

Un plaignant, qui est procureur général d'une province, a déclaré que, « conscient de ses devoirs et responsabilités », il écrivait à titre officiel afin de porter une question à l'attention du Conseil. Il a dit que la police avait arrêté le véhicule que conduisait un juge parce qu'il y avait de la neige sur le pare-brise arrière de celui-ci, ce qui allait à l'encontre du code de la route. Le juge s'était fait demander de se soumettre à un alcootest, mais n'a pas été inculpé, parce que les résultats du test étaient inférieurs au seuil prescrit pour porter des accusations.

Dans la réponse qu'il a adressée au plaignant, le Conseil a souligné que le juge a confirmé qu'il n'avait été inculpé d'aucune infraction, étant donné que les résultats de l'alcootest ne justifiaient pas de mise en accusation. Le juge a confirmé qu'il avait été assujetti, conformément au code de la route, à une procédure administrative qui rendait toute personne ayant un taux d'alcool supérieur au seuil prescrit passible d'interdiction de conduire pendant vingt-quatre heures. Le juge regrettait sincèrement l'incident et a admis son entière responsabilité, soulignant qu'il avait apprécié le tact et le professionnalisme dont la police avait fait montre à son endroit.

Plainte 20

Une audience relative à une demande de cautionnement d'un autochtone accusé de meurtre au second degré a fait l'objet d'une plainte de la part des membres de la famille de la victime, qui ont reproché au juge d'avoir utilisé le mot « brutes » pour décrire un groupe de personnes, dont le défunt, qui se sont rendues au domicile de l'accusé le soir en question. À leur avis, le juge a fait un jugement de valeur qui n'était pas fondé sur la preuve. Elles ont également contesté le fait que le juge avait blâmé plusieurs filles qui étaient présentes dans la maison de l'accusé, relativement au meurtre, « sans prononcer un seul mot de nature à discréditer l'accusé dans la cause ».

Le juge a expliqué qu'il avait utilisé le mot « brutes » délibérément, dans le contexte des actes de violence dont les autochtones et d'autres minorités visibles sont souvent victimes dans la société. Il a employé le mot afin de faire une distinction entre les personnes qui s'étaient comportées de façon pacifique à la soirée en question et celles qui sont arrivées plus tard. Compte tenu du témoignage de la mère de l'accusé selon lequel elle s'apprêtait à déménager avec sa famille à l'extérieur de la ville parce qu'elle craignait la conduite de certaines personnes qu'elle considérait comme des amis de l'accusé, il a conclu que le mot « brutes » décrivait correctement le groupe de nouveaux venus. Les plaignants ont été avisés que, même si le choix du mot était peut-être inopportun, compte tenu de la preuve dont le juge était saisi, il n'avait pas commis d'action fautive nécessitant une intervention plus poussée de la part du Conseil.

Plainte 21

Au cours de l'exercice 2001-2002, un dossier a été classé par un sous-comité. Les plaignants et intimés dans une affaire relevant du droit des biens ont reproché au juge d'avoir formulé des « remarques précises à caractère religieux » qui les avaient blessés. Les plaignants ont souligné que le jugement avait été infirmé en appel et que la Cour d'appel « avait pris la peine de mentionner que les remarques du juge n'étaient pas pertinentes quant aux questions dont il était saisi et qu'elles n'étaient nullement justifiées ». Les plaignants ont ajouté que le juge « avait déposé un jugement écrit qui était différent de la décision qu'il avait rendue verbalement lorsqu'il a appris que celle-ci avait été portée en appel ».

Un sous-comité de trois membres a conclu que l'allégation concernant la modification des motifs du jugement n'avait pas été prouvée et a rappelé aux plaignants que les allégations relatives aux erreurs que comporteraient les motifs de jugement ne peuvent être révisées que par voie d'appel. Le sous-comité avait accepté les explications du juge au sujet de son expression « opiner du bonnet », du sens que cette expression avait et du sens qu'il voulait lui donner, soit reconnaître par un signe un accord tacite. En ce qui a trait à sa remarque : « Maître, je comprends que vos gens, jadis, aient passé 40 ans dans le désert.  Ils ne vont pas vite », le sous-comité estimait qu'elle était déplacée et que le juge n'aurait pas dû la formuler. Le sous-comité a fait parvenir au juge une lettre dans laquelle il a exprimé sa désapprobation au sujet de cette  remarque.

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