1 janvier 1996

Exemples de plaintes reçues durant l'année 1996-1997

Plainte 1

Un plaignant a soutenu que, au cours d'une instance relevant du droit familial, le juge a ri de lui et refusé de lui accorder un ajournement, s'est rangé du côté de la partie adverse et a tranché l'affaire avant de lui permettre de présenter ses arguments. 

Lorsque des explications ont été demandées au juge, celui-ci a indiqué que l'instruction avait été reportée à quelques reprises pour permettre au plaignant de retenir les services d'un avocat et qu'un autre ajournement aurait été inacceptable.  Le juge a mentionné qu'il aurait été inadmissible de sa part de rire du plaignant et qu'il ne l'avait pas fait.  Il a ajouté qu'il avait écouté les arguments du plaignant, mais qu'il l'avait rappelé à l'ordre lorsque celui-ci s'était montré répétitif.

Plainte 2

Le président d'une association qui aide les personnes à se représenter elles-mêmes a soutenu qu'un juge l'avait traité comme un « charlatan » au cours d'une audition concernant un client de l'association.  

Le juge a expliqué que certaines des méthodes de l'association étaient abusives et arbitraires et que plusieurs procédures relatives à des allégations d'exercice illégal du droit avaient été engagées.  La plainte a été jugée sans fondement et le plaignant a été informé en ce sens aux termes de la Loi sur les juges.

Plainte 3

Un plaignant a allégué qu'un juge s'était mal comporté en lui suggérant de retenir les services d'un avocat dans l'action en responsabilité civile  délictuelle qu'il avait engagée contre l'État.  Il a également formulé des allégations visant plusieurs avocats dont il avait retenu les services ou contre lesquels il avait agi. 

Le plaignant a été avisé que le juge avait agi dans les limites de sa compétence lorsqu'il lui a proposé de retenir les services d'un avocat et qu'aucune faute de comportement n'avait été établie.

Plainte 4

Une plaignante dans une affaire de harcèlement avec menaces a soutenu qu'un juge [Traduction] « avait très mal agi et s'était conduit d'une façon scandaleuse » lorsque, après avoir acquitté l'accusé, il a mentionné que la plaignante avait eu une « réaction excessive »;  par suite de ce commentaire, la plaignante s'est sentie encore [Traduction] « plus diminuée et atteinte ». 

La plaignante a été avisée qu'il appartenait à une cour d'appel de dire si le juge avait eu raison d'affirmer qu'elle avait « eu une réaction excessive », mais que le Conseil n'avait pas compétence pour rouvrir l'affaire.

Plainte 5

Dans un autre dossier, le plaignant, qui était partie à une instance relevant du droit de la famille, a demandé le contrôle judiciaire de la décision qu'un juge avait rendue au sujet d'une demande de pension alimentaire provisoire, en alléguant que [Traduction] « les hommes ne sont pas traités de façon équitable en droit de la famille ». 

Le plaignant a été avisé qu'il n'avait présenté aucun élément établissant que le juge s'était mal conduit.

Plainte 6

Un plaignant a soutenu que la juge qui avait rendu la décision dans une affaire le concernant avait des préjugés contre les hommes, [Traduction] « qu'elle avait souvent invoqué des arguments favorables aux positions des femmes et qu'elle avait agi comme si elle avait été avocate de la poursuite », qu'elle avait refusé d'entendre sa version de l'affaire, tout comme celle de plusieurs autres requérants qui s'étaient présentés avant lui, et que, [Traduction] « de façon générale, elle a ignoré les plaidoyers des représentants de tous les pères ». 

La juge concernée a souligné que le plaignant avait précédemment obtenu des droits de visite, mais qu'une ordonnance restrictive était en vigueur à la date de l'audience, qu'une évaluation psychologique avait été demandée conformément à une ordonnance en vigueur, mais qu'elle n'avait pas encore été faite et que, compte tenu des affidavits versés au dossier, de l'évaluation qui n'avait pas encore été faite et des allégation02s d'agression sexuelle, elle a jugé plus prudent d'attendre l'évaluation avant d'accorder des droits de visite.  Le plaignant a été avisé de l'absence de preuve établissant que la juge s'était mal comportée ou qu'elle avait des préjugés contre les hommes.

Plainte 7

Une femme qui cherchait à empêcher son ex-conjoint de revoir leur fille a soutenu que, au cours d'une conférence précédant l'instruction, la juge avait fait montre de partialité à son endroit et avait formulé des remarques humiliantes en présence de son ex-conjoint et de son avocat.  Ainsi, la juge aurait dit que [Traduction] « tous les enfants se retrouvent dans la rue lorsque la famille s'est vu refuser des droits de visite ». 

La juge a nié avoir prononcé de tels propos et souligné qu'il y avait des cas dans lesquels il était préférable, dans l'intérêt de l'enfant, de refuser à une partie les droits de visite qu'elle demandait.  La juge a précisé qu'elle n'a jamais eu l'intention de formuler des commentaires blessants et qu'elle regrettait que la plaignante ait mal interprété ses propos.  La plaignante a été avisée que, même si le Conseil déplorait l'insatisfaction de celle-ci, il est normal que, au cours des conférences préparatoires à l'instruction, les juges s'éloignent de leurs rôles traditionnels et agissent d'une façon un peu plus familière et moins formelle.

Plainte 8

Une plaignante a fait valoir que le juge s'était montré partial à son endroit parce qu'elle était une femme, qu'il avait jugé l'affaire à l'avance et qu'il ne pouvait être impartial. 

Aucun élément de preuve n'a permis de conclure que les allégations de la plaignante étaient fondées, ou que le juge a fait davantage qu'exercer les fonctions qui lui incombent comme juge de première instance lorsqu'il a, par exemple, interrompu son avocat.

Plainte 9

Un plaignant a soutenu que la Cour [Traduction] « agit de façon à perpétuer un cercle vicieux menant les parents qui n'ont pas la garde de leurs enfants à la pauvreté » et a demandé si un juge [Traduction] « appuyait un programme inconnu approuvé par un mouvement sexiste quelconque qui vise à enrichir les parents obtenant habituellement la garde ».  Il a dit que le juge était [Traduction] « l'auteur » d'un paiement minimum d'au moins 400 $ au titre d'une pension alimentaire pour enfant.  Le Conseil a été informé qu'il s'agissait d'un montant que le juge avait fixé dans un autre jugement.  Le plaignant a également demandé une enquête au sujet des affaires dont le juge avait été saisi ainsi que des procédures d'exécution « draconiennes » et de l'ensemble du système de droit de la famille. 

Le plaignant a été avisé que sa lettre ne renfermait pas le moindre élément justifiant une enquête au sujet du juge et que la pension alimentaire pour enfant était une question relevant principalement des gouvernements, notamment les gouvernements provinciaux, qui étaient responsables des programmes d'exécution des ordonnances de pension alimentaire dans chaque province.

Plainte 10

La plaignante était l'intimée dans une requête que le père de leur enfant avait déposée en vue d'obtenir une modification de l'ordonnance de garde provisoire.  Le père avait déposé la requête parce que la plaignante avait retiré unilatéralement leur fils d'une école juive et l'avait inscrit dans une école chrétienne.  La femme a reproché au juge d'avoir fait montre de partialité à son endroit parce qu'il était juif et qu'il avait refusé de se récuser pour cette raison. 

Le juge concerné a expliqué qu'il estimait nécessaire, dans l'intérêt de l'enfant, que le statu quo soit préservé jusqu'à l'instruction.  Il a permis à la plaignante de conserver la garde de l'enfant, pourvu que celui-ci continue à fréquenter l'école juive, faute de quoi la garde provisoire serait confiée au père.  La plaignante a accepté de conserver la garde de son fils et de continuer à l'envoyer à l'école juive.  Toutefois, le juge a reçu de l'école une lettre indiquant qu'elle ne pouvait accepter l'enfant, parce que la mère avait insisté pour que celui-ci répète qu'il détestait l'école et qu'il aimait Jésus.  La lettre a constitué le fondement d'une requête visant à obtenir une ordonnance d'outrage au tribunal contre la plaignante.  Le Conseil a informé la plaignante de l'absence de preuve de mauvaise conduite de la part du juge.

Plainte 11

Un plaignant avait interjeté appel d'une décision qu'un arbitre des petites créances avait rendue en faveur de la partie intimée et a soutenu que le juge lui avait dit à voix haute de se taire (« shut your mouth »); selon lui, il avait été traité de façon différente parce qu'il est un Indien d'Asie. 

Le juge a fourni une transcription de l'audience au cours de laquelle le plaignant a déclaré qu'il veillerait à ce que [Traduction] « M. X n'obtienne pas un sou de ma part ».  À ce moment, le juge a dit : [Traduction] « Monsieur, vous feriez mieux de vous taire;   je ne veux pas entendre un mot de votre bouche ».  Le juge a ajouté que son choix de mots était inapproprié, mais que le plaignant avait commis un outrage au tribunal ou était venu bien près de le faire en disant que, malgré la décision de la Cour ou la décision antérieure de l'arbitre, l'intimé n'obtiendrait pas un sou de lui.  Le juge a dit qu'il ne pouvait se rappeler aucun cas dans lequel une décision avait été contestée aussi ouvertement.  Le juge s'est montré ennuyé que le plaignant refuse de croire que ses commentaires n'étaient nullement liés au fait qu'il était un Indien d'Asie.  Il a accepté que sa lettre soit remise au plaignant.  Le dossier a été classé, parce qu'il ne renfermait aucun élément justifiant l'intervention du Conseil.

Plainte 12

Un plaignant, qui avait à la fois la citoyenneté jamaïcaine et canadienne, s'était représenté lui-même dans une requête qu'il avait déposée en vue d'obtenir le droit de voir ses enfants.  Il a demandé une ordonnance l'autorisant à amener les enfants en Jamaïque pour les vacances d'été, mais son ex-épouse s'est opposée à la requête, déclarant dans son affidavit qu'il ne reviendrait pas au Canada avec les enfants, que la Jamaïque était un pays marqué par la violence et que la sécurité des enfants serait en péril au cours de ce séjour.  Le plaignant a fait valoir que le juge a rejeté la requête parce que des amis lui avaient dit que la Jamaïque était un pays instable et empreint de violence et qu'il avait [Traduction] « beaucoup de préjugés au sujet des relations que les hommes entretiennent ou devraient entretenir avec leurs enfants ». 

Le juge a confirmé que l'épouse du plaignant avait présenté des arguments au sujet de la sécurité des enfants, et qu'il avait fondé sa décision sur les arguments formulés par les deux parties.  Il a nié que ses remarques indiquaient qu'il s'opposait à des droits de visite généreux en faveur des pères ou qu'il était d'accord avec cette idée.  Le juge s'est excusé du tort qu'il a pu causer par inadvertance.  Le plaignant a reçu une copie de la lettre du juge et a été avisé que le Conseil n'avait aucun motif lui permettant de conclure que la décision du juge était fondée sur les commentaires que celui-ci aurait fait.

Plainte 13

Un homme qui était partie à une demande de garde et son amie ont allégué qu'un juge avait affiché des opinions racistes stéréotypées et avait dépeint le plaignant comme un autochtone qui, en  plus d'être un ivrogne irrégulier, était irresponsable.  Ils ont été offusqués que le juge ait demandé au plaignant de parcourir une longue distance en automobile pour aller chercher ses enfants au motif que les hommes peuvent conduire sur de plus longues distances que les femmes.  Après un examen de la transcription, les plaignants ont été avisés qu'aucun élément du dossier ne permettait de conclure que le jugement était empreint de partialité ou discriminatoire, même si le juge estimait que le comportement antérieur du père suscitait des inquiétudes. 

Le plaignant a été avisé que, lorsque le juge a fixé les modalités de façon que ce soit le plaignant qui aille chercher les enfants, il a tenu compte du fait que son ex-conjointe n'avait pas de véhicule.  Le plaignant et son amie ont également été avisés que, s'ils n'acceptaient pas la décision, ils devaient la porter en appel, mais que, dans le cadre d'un examen des différentes solutions possibles avec un conseiller juridique, ils pourraient aussi songer à avoir recours à un conseiller en matière familiale afin de trouver des façons d'aider les enfants à maintenir des relations saines avec toutes les personnes concernées.

Plainte 14

Un plaignant, qui avait demandé le contrôle judiciaire d'une décision par laquelle il avait été expulsé d'une université, a soutenu que le juge était en situation de conflit d'intérêts, parce qu'il avait fait partie du cabinet d'avocats représentant l'université et avait représenté celle-ci lorsqu'il était associé au sein du cabinet. 

Le juge a expliqué qu'il avait effectivement représenté l'université avant d'être nommé juge mais que, après avoir exercé sa charge de juge pendant 15 ans, il n'estimait pas nécessaire de se récuser dans des affaires concernant l'université ou le cabinet d'avocats dont il avait fait partie.  Le plaignant a été avisé que le juge avait bien agi et qu'il ne s'agissait pas d'un cas dans lequel il aurait dû se récuser, parce qu'il n'avait plus de lien avec l'université et que beaucoup de temps s'était écoulé depuis la date à laquelle il était devenu juge.

Plainte 15

Une plaignante, qui était la mère de deux victimes présumées dans une affaire d'agression sexuelle, a soutenu que le juge avait acquitté l'accusé parce qu'il connaissait celui-ci en raison des liens antérieurs qu'il avait entretenus avec un parti politique. 

Le juge a nié catégoriquement qu'il connaissait déjà l'accusé ou qu'il avait eu des liens quelconques avec lui.  Il a précisé qu'il était au courant de la présence à l'instruction de deux personnes avec lesquelles il avait déjà eu des liens politiques, mais que les audiences de la Cour sont publiques et que la présence de ces personnes n'a nullement influencé sa décision.  La plainte a été jugée sans fondement, en raison de l'absence d'éléments de preuve indiquant que le juge connaissait l'accusé ou avait déjà eu des liens avec lui.

Plainte 16

Le plaignant, qui avait présenté une demande de contrôle judiciaire à l'égard des mesures disciplinaires que le Collège des médecins et chirurgiens avait prises contre lui, a fait valoir que trois juges étaient en situation de conflit d'intérêts.  Selon le plaignant, un juge avait déjà siégé plus tôt dans une affaire où il avait été partie et pourrait être lié à l'avocat de la partie adverse parce qu'ils avaient le même nom;   le deuxième juge avait déjà fait partie du même cabinet d'avocats que son propre avocat et le troisième juge connaissait déjà le plaignant et l'évolution de sa cause devant la Cour. 

Des explications ont été demandées aux trois juges concernés.  Le premier juge a dit qu'il avait siégé dans une affaire tout à fait différente qui concernait le plaignant, mais que l'avocat de celui-ci ne s'était pas opposé, et qu'il n'avait aucun lien avec l'avocat de la partie adverse.  Le deuxième juge avait effectivement exercé le droit dans le même cabinet d'avocats que l'avocat du plaignant, mais il l'avait fait avant sa nomination à la Cour quinze ans plus tôt.  Enfin, le troisième juge a dit qu'il ne connaissait nullement le plaignant auparavant et qu'il n'était pas au courant des procédures antérieures qu'il avait engagées devant les tribunaux.  La plainte a été jugée sans fondement, en raison de l'absence de preuve de mauvaise conduite.

Plainte 17

La plaignante a reproché à un juge, qui avait siégé au banc ayant, en appel, infirmé la condamnation pour meurtre de son fils et ordonné un nouveau procès, d'avoir siégé à un autre banc, en appel, dix ans plus tard, au sujet d'une affaire connexe.  Elle a soutenu qu'en siégeant à ce dernier banc, le juge s'était placé en situation de conflit d'intérêts. 

Après l'examen de la plainte, la plaignante a été avisée qu'aucune raison n'empêchait le juge de siéger dans une demande qui a été présentée près de dix ans plus tard au sujet d'une question touchant la même affaire.  Aucun élément de la preuve n'indiquait l'existence d'un intérêt personnel de la part du juge.

Plainte 18

Un plaignant, qui s'était vu adjuger des dépens par un juge dans une requête qu'il avait déposée dans sa demande de divorce, a présenté devant un autre juge une requête pour cause de défaut de paiement contre l'avocat de son ex-épouse et a ajouté le nom de l'avocat à l'intitulé de la cause dans l'affaire de divorce.  Le deuxième juge a rejeté la requête et ordonné au plaignant de payer les frais.  Le plaignant a soutenu que le juge avait mentionné que le premier juge [Traduction] « devrait refaire ses classes » pour avoir condamné l'avocat à payer les frais, puisque le plaignant s'était représenté lui-même. 

Lorsque des explications lui ont été demandées, le juge concerné a admis qu'il avait eu tort de critiquer le premier juge et a ajouté qu'il s'était excusé et que les excuses avaient été [Traduction] « acceptées de bonne grâce ».  Le plaignant a été avisé que l'adjudication des frais est une question qui relève du pouvoir discrétionnaire d'un juge et que le Conseil ne peut réexaminer.  Il a également été avisé que, puisque le juge avait reconnu que ses commentaires concernant l'ordonnance de l'autre juge n'étaient pas opportuns, il n'y avait aucun motif justifiant une intervention plus poussée de la part du Conseil.

Plainte 19

Le plaignant, qui était président d'une organisation bénévole qui administre un programme de hockey mineur, a allégué qu'un juge nouvellement désigné a tenté de se servir de sa position en tant que juge pour atteindre des objectifs personnels en employant le papier à lettre qu'il utilise dans le cadre de ses fonctions pour se plaindre des limites géographiques de la ligue et déclarer qu'il ne tolérerait pas cette situation l'an prochain. 

Le juge a fait savoir au Conseil qu'il avait discuté de la question avec des juges supérieurs, qui lui ont dit qu'il n'aurait pas dû employer son papier à lettre officiel pour écrire des lettres personnelles.   Le juge s'est excusé, disant qu'il n'avait pas utilisé le papier à lettre officiel pour obtenir un avantage personnel.  Le plaignant a été avisé que [Traduction] « cet incident était très malheureux », mais que le juge s'était excusé de ne pas avoir tenu compte des incidences de l'emploi du papier à lettre officiel pour la correspondance privée; par conséquent, aucune autre intervention du Conseil n'était nécessaire.

Plainte 20

Une plainte semblable a été déposée par le voisin d'un juge, qui s'est opposé à ce que celui-ci utilise le papier à lettre du tribunal pour soulever des objections personnelles au sujet du fait que le plaignant garait son camion dans le voisinage.  Selon lui, l'utilisation du papier à lettre indiquait de la part du juge « l'intention d'intimider » et traduisait un emploi à mauvais escient de sa position de juge. 

Celui-ci s'est excusé d'avoir utilisé le papier à lettre, précisant qu'il n'avait pas eu l'intention d'intimider le plaignant et que, en fait, il n'avait même pas envisagé cette possibilité.  C'était le seul papier qu'il avait sous la main lorsqu'il a écrit la note, a dit le juge.  Le plaignant a été avisé qu'il était préférable que les juges n'utilisent pas le papier à lettre officiel à des fins privées, mais que l'incident n'était pas suffisamment grave pour justifier des mesures supplémentaires de la part du Conseil.

Plainte 21

Un plaignant, qui avait témoigné en qualité d'expert au cours d'une instruction, a dit qu'il avait une voix très basse et très douce.  Il a soutenu qu'un juge a semblé fâché de ne pas pouvoir comprendre ce qu'il disait et s'est adressé brusquement à lui pour lui demander de parler plus fort.  Le témoin s'est dit scandalisé par la conduite du juge.  Le juge a expliqué que le premier témoin du procureru de la Couronne était un enfant de 12 ans qui avait parlé à voix très basse.  Le deuxième témoin était également difficile à entendre.  Une transcription de l'audition faisait état de l'échange suivant au cours duquel le juge a dit au procureur de la Couronne :  [Traduction] « Vous ne semblez pas avoir beaucoup de chance avec vos témoins, j'en ai bien peur.  J'espère que ce témoin-ci aura la bonne idée de parler plus fort.  Que vient-il de dire? » Le juge a ensuite demandé au plaignant de [Traduction] « parler dans le microphone et de parler fort et clairement : comprenez-vous ce que je viens de vous dire? ». 

Le juge s'est excusé sans réserve auprès du plaignant et a dit qu'il voulait [Traduction] « l'assurer que ma seule intention était de veiller à ce qu'il parle plus fort ».  Le plaignant a reçu une copie de la lettre du juge et a été informé que le Conseil déplorait le manque de courtoisie du juge et accueillait favorablement ses excuses sans réserve.

Plainte 22

Un plaignant a été offusqué des commentaires d'un juge qui auraient été publiés dans un journal.  Le juge aurait apparemment mis brusquement fin à une audience avant que les dernières plaidoiries soient terminées et aurait dit à l'avocate de l'une des parties, lorsqu'elle a débuté sa plaidoirie, [Traduction] « vous avez six minutes pour chanter ».  Il aurait également dit qu'il était [Traduction] « un juge d'une journée » et qu'aucune règle de droit ne l'obligeait à rendre une décision dans un délai précis.  Le plaignant s'est offusqué de l'arrogance du juge et a demandé la révocation de celui-ci. 

Lorsque des explications lui ont été demandées, le juge s'est excusé et a reconnu [Traduction] « qu'il avait réagi de façon brusque et inconvenante ».  Il a dit que, après l'audience en question, il avait pris des dispositions pour terminer l'audience la semaine suivante, même s'il ne devait pas siéger, et qu'il s'était excusé auprès de l'avocate et de ses collègues au début de l'audience.  Les avocats de toutes les parties ont indiqué qu'ils acceptaient que le juge continue à siéger à l'instance.  Le plaignant a reçu une lettre faisant état du manque de courtoisie regrettable du juge et de ses excuses sans réserve.  Aucune autre intervention du Conseil n'était donc justifiée.

Plainte 23

La plaignante, mère d'une fillette dans une affaire d'agression sexuelle, d'exploitation sexuelle et d'inceste où le juge a déclaré l'accusé non coupable, a soutenu que le juge avait eu tort d'en arriver aux conclusions qu'il a tirées.  Selon elle, un déni de justice avait été commis et le Conseil devait examiner les motifs que le juge avait invoqués au soutien de son verdict ainsi que la capacité du juge de siéger dans les affaires d'agression sexuelle.

La plaignante a été avisée que sa lettre traduisait ce qu'un procureur de la Couronne pourrait considérer comme des motifs d'appel, mais que le Conseil n'avait aucune raison d'intervenir davantage, au motif qu'une [Traduction] « décision impopulaire n'équivaut pas à une mauvaise conduite visée par la compétence du Conseil ».

Plainte 24

Un plaignant prétendait que le juge en chef adjoint avait fait preuve de partialité dans l'administration du système de gestion des instances en décidant, dans une affaire de faillite, qu'une société devait être représentée par un avocat. Il prétendait qu'à la suite d'une rencontre avec son juge en chef, le juge en chef adjoint avait pris certaines mesures tout en continuant de siéger comme juge dans l'instance en matière de faillite bien qu'un avis d'appel lui eût été signifié à titre d'intimé.

Le plaignant a été informé que le Conseil n'avait pas le pouvoir de donner des ordres à un juge dans l'exercice de ses fonctions judiciaires. Le fait que le plaignant était fondamentalement en désaccord avec certaines décisions et que celles-ci ont eu des répercussions importantes sur ses droits et sur ceux du créancier qu'il représentait n'équivaut pas à de la partialité. Le juge en chef adjoint a nié avoir agi sous l'influence de son juge en chef. Le plaignant a de plus été informé que les juges ne sont pas tenus de se récuser parce qu'un appel est déposé.

Plainte 25

Un plaignant, partie à un litige entre un propriétaire et un locataire, alléguait qu'un juge qui avait présidé à l'instruction [TRADUCTION] « soit était incompétent, soit avait des intérêts cachés », mais il n'a fourni aucun détail concernant l'allégation de conflit d'intérêts. Le plaignant avait écrit au juge en chef et au juge en chef adjoint de la Cour au sujet du juge en question mais, ne recevant aucune réponse, il a déposé une plainte au Conseil au sujet de ces trois juges. Il alléguait que le juge en chef était un ami intime du propriétaire et qu'il avait présidé à un mini-procès.

En réponse aux questions qui lui ont été posées, le juge a précisé que le plaignant était le défendeur dans le litige entre le propriétaire et le locataire et qu'il avait été débouté. Sa demande reconventionnelle contre le propriétaire avait été rejetée et il avait été tenu de payer les dépens. Il a interjeté appel, mais n'a pas obtenu gain de cause. Le juge a fait remarquer que le juge en chef n'avait pas présidé au mini-procès comme le prétendait le plaignant. La plainte a été jugée sans fondement.

Plainte 26

Un plaignant a rédigé dix lettres alléguant des conflits d'intérêts contre un certain nombre de juges. Il a prétendu qu'un juge était en conflit d'intérêts parce que, quand elle était présidente du barreau d'une province, elle avait refusé de le rencontrer pour entendre ses allégations contre un avocat.

Les lettres ne donnaient aucun renseignement à l'appui des allégations contre plusieurs autres juges. Un certain nombre de plaintes semblaient, toutefois, avoir trait au règlement de plaintes antérieures. Les plaintes ont été jugées sans fondement.

Plainte 27

Un plaignant, mécontent des décisions de trois juges ayant trait à ses réclamations contre le ministère des Services sociaux de sa province, a envoyé une demande directement au juge en chef de cette province et s'est plaint que le juge en chef ne lui avait pas répondu directement.

Le juge en chef, à qui on a demandé de commenter cette affaire, a déclaré que le plaignant avait déjà déposé de nombreuses plaintes contre le ministère et qu'il faisait l'objet d'une ordonnance l'obligeant à obtenir l'autorisation de la Cour avant d'engager d'autres procédures afin d'éviter les instances frivoles et vexatoires. D'après le juge en chef, le plaignant avait ignoré la procédure appropriée en lui adressant directement la demande et le juge en chef avait donc déféré l'affaire à un autre juge, qui faisait également l'objet d'une plainte. La plainte a été jugée sans fondement.

Plainte 28

Deux plaintes, déposées par suite d'un reportage et de questions adressées à la Chambre des communes concernant les répercussions pouvant découler des contacts entre un haut fonctionnaire du ministère de la Justice et le juge en chef Isaac de la Cour fédérale du Canada, ont été attribuées au même sous-comité par le président du Comité sur la conduite des juges. Les plaintes étaient uniques en ce qu'elles avaient été déposées par le président du Comité sur la conduite des juges. Dans le premier dossier concernant le juge en chef Isaac, une plainte avait été reçue ultérieurement d'une personne ayant des intérêts dans le litige. La plainte du président du Comité indiquait que des allégations avaient été faites dans une instance selon lesquelles le juge en chef Isaac avait [TRADUCTION] « fait des observations au nom d'une partie dans cette instance » et que ces observations avaient amené « directement ou indirectement » le juge en chef adjoint Jerome à se récuser comme président du tribunal. Dans le deuxième dossier, le président du Comité a demandé au juge en chef adjoint de répondre aux allégations indiquant qu'il avait [TRADUCTION] « sérieusement retardé la conduite de l'instance ».

Après réception des réponses, les dossiers ont été déférés à un sous-comité  de trois membres qui a demandé qu'une enquête indépendante soit effectuée concernant les deux plaintes. En s'appuyant sur les résultats de cette enquête, le sous-comité a conclu qu'il était justifié, dans chaque cas, de désapprouver la conduite du juge. En raison de l'intérêt qu'a suscité cette affaire chez le public, des communiqués ont été publiés au moment où les dossiers ont été classés.

Plainte 29

Une femme demandant la garde conjointe ou des droits de visite concernant un enfant adopté par une autre femme s'est plainte qu'un juge avait admis avoir des préjugés dans des affaires de ce genre, qu'il n'avait pas pris sa cause au sérieux et qu'une requête en radiation de sa demande avait été accordée cinq minutes après le début de l'audience.

Le jugement a été infirmé en appel et renvoyé au tribunal de première instance. Par la suite, le juge a envoyé une lettre ouverte à un journal étant donné que cette affaire avait fait l'objet d'une large couverture médiatique. Le sous-comité formé d'un membre a conclu qu'une enquête officielle n'était pas justifiée, mais qu'il y avait lieu de désapprouver la conduite du juge. Le sous-comité a conclu qu'il n'y avait pas de preuve que le juge entretenait des préjugés dans le sens perçu par la plaignante, mais celle-ci avait des motifs de croire que sa demande n'avait pas été prise au sérieux par la Cour.

Plainte 30

Une plaignante dans une action civile alléguait qu'une juge avait rendu son jugement en anglais seulement alors que toutes les parties à l'instance étaient francophones et que l'instruction s'était déroulée en français.

Selon son interprétation de la politique de la Cour, fondée sur la jurisprudence en vigueur, la juge a estimé qu'elle pouvait rédiger son jugement dans la langue de son choix et, dans cette affaire, comme le jugement était long, la juge avait choisi la langue qu'elle maîtrisait le mieux pour pouvoir rendre le jugement rapidement. Le sous-comité formé de deux membres a conclu qu'il n'y avait pas de preuve d'inconduite et qu'il n'y avait aucune raison de désapprouver la conduite de la juge. Toutefois, le sous-comité a noté qu'il était préférable qu'un jugement soit prononcé ou écrit en français si le français a été utilisé au cours d'une audience ou, subsidiairement, qu'il soit écrit en anglais et traduit en français avant d'être publié. La plaignante a également été informée des directives du gouvernement provincial indiquant que, sur demande, les jugements prononcés en anglais peuvent être traduits en français sans frais pour les plaideurs. Le sous-comité a également déclaré qu'il aurait aussi été préférable que la juge informe les parties lorsque, comme dans cette affaire, la langue du procès ne sera pas celle utilisée pour la rédaction du jugement de façon que les parties puissent retenir les services d'un interprète pour faire la traduction simultanée si elles le désirent.

Plainte 31

Un plaignant, membre d'une association qui conseille des personnes non représentées par des avocats, alléguait qu'un juge avait refusé de l'entendre au sujet d'une requête en mesures provisoires, qu'il s'était fâché et lui avait donné l'ordre de retenir les services d'un avocat. Le plaignant a indiqué que ses plaidoiries avaient été préparées par un membre de l'association qui n'était pas membre du Barreau. L'association était également désignée comme intervenante dans l'instance.

On a demandé au juge de faire des observations à ce sujet. Le juge a déclaré que, pour la préparation des plaidoiries, si le plaignant a besoin d'aide juridique, il doit retenir les services d'un avocat autorisé à pratiquer et, le plaignant, qui n'a aucune formation juridique, n'a peut-être pas bien compris que sa requête avait été rejetée parce qu'elle n'était pas conforme à la loi. Un sous-comité formé d'un membre a statué qu'en raison de son manque d'expérience devant les tribunaux le plaignant n'avait peut-être pas su indiquer clairement qu'il voulait débattre un point de droit ayant trait à sa requête, ou qu'il souhaitait demander un ajournement pour se préparer. Le sous-comité a jugé malheureux que le plaignant ait interprété l'intervention du juge comme un manque d'équité ou comme une critique, mais le Conseil n'a pas compétence pour renverser la décision d'un tribunal. Par la suite, le plaignant a exercé son droit d'appel devant un tribunal supérieur. Le sous-comité a conclu qu'aucune action n'était justifiée en vertu de la Loi sur les juges.

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