1 janvier 1995

Exemples de plaintes reçues durant l'année 1995-1996

Dans un des dossiers figuraient trois lettres contenant des allégations de sexisme à l'endroit des femmes, l'une provenant d'un centre pour femmes et les deux autres, de plaignantes. On soutenait qu'un juge siégeant à un tribunal de la famille avait prononcé des paroles offensantes et s'était montré intimidant à l'endroit des femmes qui comparaissaient devant lui.  Une plaignante disait qu'il l'avait menacée de prison si elle persistait à empêcher son ex-époux de voir son enfant, et une autre soutenait que le juge avait refusé qu'elle-même ou son avocat ne présente et défende sa cause.

Le juge a expliqué qu'il avait seulement utilisé un langage ferme, mais approprié, pour avertir la première plaignante des conséquences qu'elle encourait en interdisant l'accès à l'enfant et que la deuxième plaignante avait eu toute liberté de présenter et de défendre sa cause. Un affidavit a d'ailleurs été produit en faveur du juge par les avocats intéressés puis par les directeurs de deux autres centres pour femmes qui disaient que le juge avait traité les litiges «en toute connaissance de cause, avec respect et avec équité». On a conclu que la plainte n'était pas fondée.

Plainte 2

Une des plaintes de sexisme contre les hommes concernait une demande de réduction de la pension alimentaire. Le plaignant a d'abord signalé un retard de cinq mois dans le prononcé du jugement, mais les motifs ont été rendus avant que le Conseil ait pu traiter la plainte. Par la suite, le plaignant a soutenu que, parce qu'il s'était plaint du juge, celui-ci avait fait preuve de partialité dans son jugement, qui s'est voulu punitif de surcroît. Le juge a nié avoir rendu une décision partiale empreinte de sexisme contre le requérant, mais a dit que le retard avait été causé par l'abondance des plaidoiries et des documents ainsi que par la complexité des points en litige. On a informé le plaignant de la réponse du juge et de la procédure à suivre s'il souhaitait interjeter appel de la décision.

Trois autres plaintes de sexisme envers les hommes concernaient également des litiges en droit de la famille, où une décision présumément injuste aurait été rendue selon les plaignants. Dans chaque cas, on a informé le plaignant qu'il devait plutôt saisir un tribunal d'appel, le Conseil n'étant pas habilité à réviser les décisions des juges.

Plainte 3

Une personne non membre du barreau, qui représentait un ami dans une cause intéressant un locateur et un locataire, avait demandé par l'entremise du greffier de la cour que l'audience se déroule dans les deux langues; lorsque cette personne s'est présentée devant le juge, ce dernier ne parlait pas français. Le plaignant soutenait que le juge avait déjà tranché contre lui avant le procès parce qu'il était francophone et membre d'une minorité visible. Le juge a ajourné l'audience à la condition que l'ami du plaignant verse chaque mois au tribunal les paiements de loyer en souffrance, une condition qui, selon le plaignant, n'était pas imposée à d'autres.

Le juge a expliqué qu'il avait demandé qu'on retienne les services d'un interprète après avoir constaté qu'il ne pouvait pas communiquer avec le plaignant et qu'il avait reporté la cause à une date spéciale parce que onze témoins devaient être convoqués. Le juge a ajouté qu'il était en droit d'exiger les paiements en raison de la nature de l'instance. Le vice-président saisi de la plainte n'a relevé aucune preuve d'inconduite. On a découvert que le personnel du tribunal avait commis une erreur en acceptant de mettre au rôle la requête du plaignant mais que cette erreur ne pouvait être imputée au juge. Le vice-président du Comité a par ailleurs déterminé que le juge avait le pouvoir d'imposer certaines conditions et que seul un tribunal d'appel pouvait modifier cette décision.

Plainte 4

Un autre plaignant, accusé dans une poursuite pénale, affirmait que le juge était un «raciste» et qu'il avait pris sa décision avant le procès.

Comme le plaignant n'a pas fourni de précisions, on n'a pu donner suite à l'allégation de racisme.

Plainte 5

Un plaignant, qui représentait un ami dans une affaire d'éviction, s'opposait à ce que le juge utilise l'expression «jeune étudiant d'Afrique» pour le désigner dans ses motifs et soutenait que ce commentaire et d'autres, relevés dans les motifs, montraient que le juge avait fait preuve de racisme.

Chacun des exemples cités par le plaignant a été examiné, et on a conclu qu'aucun n'étayait une allégation de racisme.

Plainte 6

Un plaignant, qui représentait une partie dans une procédure de garde, déclarait qu'un juge avait un parti pris contre les hommes et qu'il était raciste. Il a cité cinq motifs à l'appui de sa plainte; entre autres, le juge aurait dit à l'intéressé de tourner la page et de continuer avec sa vie et lui aurait ordonné d'encaisser un certificat de placement garanti pour le donner à son ex-épouse bénéficiaire de l'aide sociale.

On a conclu que les allégations n'étaient pas fondées et que le Conseil ne pouvait être saisi d'une plainte portée à l'encontre de la décision du juge.

Plainte 7

Un plaignant, qui était partie à un litige contractuel, accusait un juge de les avoir insultés, lui et sa femme, en attaquant leur race et leur religion, d'avoir crié contre un témoin, de ne pas avoir tenu compte de certains éléments de preuve, d'avoir traité sa femme comme un vulgaire objet et d'entretenir des liens ou d'avoir pris entente avec la partie adverse.

Après avoir passé en revue les motifs de son jugement, le juge a reconnu avoir utilisé un terme incorrect pour s'adresser au plaignant et à sa femme et les a priés de l'excuser parce qu'il n'avait pas l'intention de les offenser ni d'insulter leur race ou leur religion. Il a fait remarquer que l'épouse du plaignant n'était pas présente à l'audience, mais avait été habilement représentée par son avocat. Après examen des allégations et des commentaires du juge, le Conseil a informé le plaignant qu'aucune mesure ne serait prise.

Plainte 8

Un plaignant, qui se représentait lui-même dans une instance civile, soutenait que la juge présidant la conférence préparatoire l'avait obligé à signer un procès-verbal de transaction favorisant la partie adverse parce que celle-ci était un avocat. Le plaignant a ajouté qu'un deuxième juge saisi d'une requête en injonction avait formulé des commentaires désobligeants à l'endroit de sa femme parce que la poursuite avait été intentée par un «ami ou fonctionnaire de la cour».

La juge ayant participé à la conférence préparatoire a cité nombre d'exemples figurant au dossier qui montrent qu'elle a averti le plaignant que toute entente devait être volontaire. Le deuxième juge a nié entretenir des rapports particuliers avec l'avocat et a fourni une transcription qui, selon lui, montre qu'il a donné au plaignant toute liberté d'exposer son point de vue au tribunal. Après examen de la plainte, des lettres des juges et de la transcription des débats, on n'a trouvé «absolument aucune preuve d'inconduite de la part des juges en cause».

Plainte 9

Les plaignants, qui étaient parties à une affaire en matière de propriété intellectuelle, ont affirmé qu'un juge avait suscité une «crainte de partialité» en conjuguant les rôles de juge et de médiateur lorsqu'il a ajourné une requête et est intervenu pour aider les parties à négocier un accord. Le juge a expliqué qu'il avait encouragé les parties à s'entendre afin d'éviter de longs délais qui leur seraient néfastes étant donné la nature de la propriété intellectuelle qui faisait l'objet du débat, qu'il était intervenu ensuite avec le consentement des deux parties et avait rencontré séparément les avocats de chaque partie, qu'il avait fait preuve d'impartialité et que les parties avaient conclu un accord de plein gré avec l'aide des avocats. Par la suite, l'avocat des plaignants a informé le Conseil que, selon lui, le juge n'aurait pas dû rencontrer les avocats séparément et qu'il s'était placé en conflit d'intérêts en agissant tour à tour comme médiateur et comme juge.

On a informé les plaignants et leur avocat que l'allégation d'inconduite n'était pas fondée. La lettre du Conseil mentionnait également toutefois le vaste débat entourant la façon de résoudre de tels conflits et la popularité croissante des méthodes de règlement des conflits pour éliminer les différends de manière plus efficace et plus rapide. Les parties ont été prévenues qu'un juge n'excède pas sa compétence lorsqu'il conclut une affaire après que les parties reconnaissent être parvenues à un accord.

Plainte 10

Un plaignant, qui était partie à une procédure de garde, soutenait qu'un juge avait été partiale lorsqu'elle lui avait dit, durant la conférence préparatoire, qu'il était probable qu'un juge de première instance accorde la garde exclusive des enfants à son ex-épouse. Il s'opposait également au nombre de conférences préparatoires tenues et au fait que le juge avait rencontré en privé son ex-épouse et l'avocat de cette dernière.

Dans ses commentaires, le juge a signalé que sa position face à la garde des enfants était fondée sur les recommandations d'un psychologue choisi d'un commun accord par les deux parties. Elle a confirmé avoir tenu sept conférences préparatoires parce que les parties ont demandé chaque fois un ajournement et avoir rencontré, séparément et conjointement, les deux parties avec leur avocat respectif, comme elle le fait habituellement. Le Conseil ayant été saisi d'une plainte, le juge a dit qu'il serait inutile de tenir une dernière conférence avant le procès, et l'affaire a été inscrite au rôle.  On a informé le plaignant que l'examen n'avait révélé aucune preuve d'inconduite et que le juge pouvait, à sa discrétion, faire des suggestions et rencontrer les parties conjointement ou séparément.

Plainte 11

Un plaignant, qui était partie à une instance en droit de la famille, soutenait que l'avocate de la partie adverse s'était arrangée pour que l'affaire soit entendue par un juge avec qui elle avait des liens personnels étroits. Il prétendait que l'avocate et son époux entretenaient des relations sociales avec le juge et son épouse et que cela lui avait valu un jugement favorisant son ex-épouse.

Le juge a nié l'existence de tels liens et le fait également que lui-même et sa femme rencontraient socialement l'avocate et son époux, précisant qu'il la connaissait seulement en tant qu'avocate oeuvrant depuis des années en droit de la famille. On a avisé le plaignant que l'allégation d'inconduite n'était pas fondée et que le Conseil n'avait pas le pouvoir d'ordonner la tenue d'une enquête sur les faits et gestes de l'avocate. Le plaignant a écrit une autre lettre dans laquelle il exprime sa profonde insatisfaction face à la réponse du Conseil et réitère ses allégations contre le juge, ajoutant que la conduite de celui-ci était partiale et discriminatoire (avec des remarques racistes), et qu'on ne devrait pas fermer les yeux. Il n'a cependant fourni aucune preuve à l'appui de son accusation de préjugé racial. On l'a informé qu'il était regrettable que la décision ne lui ait pas été satisfaisante, mais qu'il n'y avait pas lieu de rouvrir le dossier.

Plainte 12

Un plaignant, qui se représentait lui-même, s'opposait à ce qu'un juge entende une cause au motif qu'il y avait un conflit d'intérêts parce que la fille et le gendre du juge travaillaient pour le même cabinet que l'avocat de la partie adverse et que sa nièce était avocate pour le cabinet où le plaignant avait déjà travaillé.

Dans ses commentaires, le juge a expliqué que sa fille et son gendre travaillaient effectivement pour le cabinet d'avocats en question, mais qu'ils n'étaient pas au courant de l'instance à laquelle le plaignant était partie. S'ils avaient été liés à une cause dont le tribunal était susceptible d'être saisi, ils en auraient informé le greffier de la cour afin qu'un autre juge soit affecté à l'instruction. De même, il a expliqué que sa nièce était avocate pour le cabinet d'avocats où le plaignant avait déjà travaillé, mais qu'il n'était pas du tout au courant de ses activités professionnelles. En raison de la plainte, le juge a informé le greffier qu'il n'entendrait plus aucun litige touchant le plaignant. On a informé celui-ci qu'il serait effectivement considéré inapproprié qu'un proche parent comparaisse devant un juge, surtout s'il s'agit d'une affaire contestée, mais qu'on acceptait généralement qu'un juge soit saisi d'une cause lorsque des parents ne sont pas directement concernés. On l'a informé par ailleurs que l'allégation d'inconduite n'était pas fondée.

Plainte 13

Un certain nombre de plaignants prétendaient qu'un juge se trouvait en conflit d'intérêts parce qu'avant sa nomination il avait représenté l'ex-époux d'une plaignante et que, de ce fait, il n'était pas impartial.

Comme la plaignante n'était concernée qu'indirectement par l'affaire et seulement parce que son nom figurait sur un des documents produits en preuve, on a prévenu les plaignants que l'allégation de conflit constituait un prétexte insuffisant pour attaquer l'intégrité du juge. On les a informés que leur plainte n'était pas fondée et que les conclusions tirées par le juge semblaient s'appuyer sur les éléments de preuve produits à l'audience et sur l'application de la loi.

Plainte 14

Une plaignante, qui était l'amie d'un demandeur dans une poursuite civile pour voies de fait et congédiement injustifié, a formulé diverses allégations contre le juge et différents avocats ayant représenté le demandeur. Elle prétendait que le juge se trouvait en conflit d'intérêts parce qu'elle avait enseigné au demandeur dans une faculté de droit, que cela l'avait amenée à connaître certains aspects de la vie privée du demandeur et qu'elle ne pouvait donc pas être impartiale. La plaignante soutenait que, pour cette raison, le juge avait approuvé le retrait des accusations criminelles portées contre un des défendeurs.

Le juge a nié éprouver du ressentiment envers le demandeur et a expliqué que, même si elle lui avait enseigné à la faculté de droit, elle n'avait souvenir d'aucune confidence qu'il aurait pu lui faire. On a informé la plaignante qu'un examen de la plainte, des commentaires du juge et de la transcription des débats n'avait révélé aucune preuve d'inconduite. De plus, on lui a précisé que seule la Couronne pouvait retirer des accusations criminelles et que la décision ne saurait alors être modifiée par un juge.

Plainte 15

Une plaignante soutenait que le fils d'un juge était un avocat rattaché à un cabinet qui avait déjà représenté la banque qui était la partie adverse à l'instance, que le juge se trouvait en conflit d'intérêts et qu'on aurait dû en informer la plaignante avant l'audience. Le juge a confirmé que son fils travaillait bien pour le cabinet en question, mais a précisé que le cabinet n'était en rien concerné par l'instance dont il était saisi, même si le cabinet représentait effectivement à l'occasion la banque qui était la partie adverse dans l'affaire en cause. On a informé la plaignante que le juge ne se trouvait pas en conflit d'intérêts du simple fait que le cabinet où travaille son fils était parfois appelé à représenter la banque.

Plainte 16

Un plaignant, qui était partie à une instance en droit de la famille, soutenait que des avocats lui avaient dit qu'un certain juge était toujours favorable aux femmes dans les causes de divorce. Il prétendait en outre que le juge détestait les membres des minorités ethniques et avait accepté un pot-de-vin de l'avocat de son ex-épouse.

On a prévenu le plaignant qu'il s'agissait d'allégations très graves, qu'aucun élément de preuve n'avait été produit à l'appui et que le Conseil ne pouvait donc prendre aucune mesure.

Plainte 17

Un plaignant, qui était partie à une instance en droit de la famille, a déposé une plainte officielle concernant le retard d'un juge à transmettre sa décision. Il avait d'abord écrit une lettre pour signaler le retard, dans laquelle il demandait simplement qu'on s'informe auprès du juge -- ce qui a été fait par l'entremise du juge en chef -- et que la lettre ne soit pas traitée comme une plainte par le Conseil. Lorsqu'il s'est plaint par la suite au sujet du retard, il a également demandé que le Conseil le défraie des dépenses «inutiles» qu'il a encourues parce que le juge avait ordonné aux parties de soumettre des observations écrites au tribunal.

Après examen, on a déterminé que l'ordonnance du juge était raisonnable «compte tenu des circonstances», et on a informé le plaignant que le Conseil ne pouvait pas lui rembourser les frais engagés.

Plainte 18

Un plaignant a formulé un certain nombre d'allégations à l'endroit d'un juge en chef qui avait été «hostile, agressif, méprisant, sarcastique et borné».

On a demandé au plaignant de fournir des précisions et on l'a prévenu que le dossier serait laissé en suspens en attendant sa réponse. Le plaignant n'a fourni aucun autre élément de preuve et le dossier a été classé pour cause de désistement.

Plainte 19

Un plaignant, qui purgeait quatre peines concurrentes d'emprisonnement à perpétuité, soutenait qu'un juge en chef n'avait pas traité avec célérité sa requête en habeas corpus.

La documentation fournie par le juge montre qu'on a clairement informé le plaignant qu'il traiterait sa requête seulement si elle était présentée conformément aux dispositions du Code criminel et aux règles de pratique. La requête n'a donc pas été entendue parce qu'elle n'était pas conforme à ces exigences et que le plaignant avait refusé d'être représenté par un avocat de l'aide juridique. L'avocat indépendant a conclu que l'allégation d'inconduite n'était pas fondée, et le plaignant en a été informé.

Plainte 20

Un plaignant soutenait qu'un juge en chef se trouvait en conflit d'intérêts dans une cause entendue en 1985 puisqu'on pouvait le voir sur une photo en compagnie du maire d'une municipalité qui était le défendeur dans l'instance. Il prétendait que le juge en chef et le maire étaient administrateurs de la même organisation durant cette période et que, par ailleurs, le juge en chef s'était lui-même désigné pour entendre la cause.

Le juge en chef a répondu que le maire n'avait jamais été membre du conseil d'administration de l'organisation en question et qu'il n'avait jamais assisté à une réunion pendant que le juge en chef y siégeait; il a nié par ailleurs s'être lui-même chargé de l'instruction. On a donc informé le plaignant que la Cour d'appel constituait sa seule voie de recours.

Plainte 21

Un plaignant soutenait qu'un juge en chef avait modifié la transcription du procès criminel de son fils à un point tel qu'il ne pouvait compter sur un appel équitable et impartial.

On a demandé au plaignant de fournir des précisions à l'appui de ses allégations. On a gardé le dossier ouvert en attendant de recevoir d'autres détails. Comme le plaignant n'a pas donné suite à la demande de précisions concernant son fils, le dossier a été classé pour cause de désistement.

Plainte 22

Un plaignant qui, comme son ex-épouse (l'autre partie), s'est représenté lui-même dans une instance en droit de la famille qui a duré quelques années, soutenait qu'un juge en chef avait commis un abus de pouvoir en renvoyant la cause à un protonotaire. Le plaignant affirmait que le juge en chef n'avait pas le pouvoir de modifier une ordonnance toujours en vigueur concernant la garde de ses enfants. Il se plaignait également du fait que la cause avait été renvoyée, sans audience, à un autre centre de la province.

Le juge en chef a expliqué qu'il avait pris la décision administrative de déférer l'affaire à un protonotaire parce que l'instance était longue et complexe et qu'il voulait que le protonotaire fournisse des éclaircissements sur les points en litige et propose des moyens de les régler. On a informé le plaignant que l'allégation d'inconduite n'était absolument pas fondée et que le Conseil n'était pas habilité à réviser la décision administrative prise dans le cadre de sa gestion de l'instance.

Plainte 23

Un plaignant, qui se représentait lui-même dans un litige commercial complexe, s'opposait à un certain nombre de décisions prononcées par neuf juges différents sur une certaine période. Il prétendait que quelques-unes des décisions étaient inappropriées et préjudiciables, tandis que d'autres étaient discriminatoires et dénotaient un parti pris. Il se plaignait que la conduite des juges se rapprochait de la corruption. Il n'a fourni aucune preuve à l'appui de ses allégations d'inconduite, et on a informé le plaignant que l'examen de sa plainte n'avait révélé aucun motif valable.

En réponse, le plaignant a formulé des accusations contre deux membres du Conseil, alléguant qu'ils avaient enfreint la Loi sur les juges en «encourageant l'obstruction et en faisant preuve d'une trop grande indulgence envers les juristes». On a déterminé que cette nouvelle allégation n'était pas fondée elle non plus, conclusion à laquelle l'avocat indépendant a souscrit.

Plainte 24

Une plaignante, qui était défenderesse avec sa mère dans une poursuite en droit des biens intentée par la soeur de la plaignante, soutenait que le juge avait conclu qu'elle maltraitait sa mère sans qu'elle ait même pu se faire entendre. Elle a produit des lettres provenant du médecin de sa mère et de voisins qui la disculpent et a demandé des excuses du juge.

Celui-ci a expliqué qu'il craignait toujours pour le bien-être de la mère de la plaignante et qu'il avait informé les parties de sa certitude quant aux mauvais traitements qu'elle subissait; il a cependant reconnu qu'il aurait quand même dû entendre le témoignage de la plaignante avant de tirer ses conclusions et a demandé qu'on lui transmette ses excuses. On a informé la plaignante que sa demande d'excuses était raisonnable et que, le juge s'étant excusé, on pouvait classer le dossier.

Plainte 25

Le plaignant, qui était partie à un litige matrimonial, soutenait que le juge avait crié contre lui, avait été impoli et sarcastique, et l'avait accusé à tort de mentir. Il prétendait que le juge n'était pas impartial et que, lorsque son avocat a essayé de s'exprimer, le juge avait aussi crié contre lui.

Le juge a expliqué que le plaignant avait omis de se conformer à certaines ordonnances imposées par lui-même et d'autres juges, et il voulait savoir pourquoi le plaignant n'avait pas produit un état financier comme il y avait été enjoint à au moins deux reprises. Le juge a reconnu avoir frappé sur le bureau avec la main et réitéré d'une voix très forte au plaignant qu'il devait se conformer aux ordonnances sans quoi il serait envoyé en prison pour outrage au tribunal. Le juge s'est excusé d'avoir frappé sur le bureau et d'avoir parlé fort. Il a cependant nié avoir dit «Je trouverai bien un motif pour vous envoyer en prison...» ainsi que les autres allégations d'inconduite formulées par le plaignant. On a transmis au plaignant les excuses du juge et la réfutation de ses autres allégations. La lettre envoyée au plaignant précisait qu'il était certes regrettable qu'un juge perde son sang-froid en cour, mais qu'un acte d'impatience isolé ne constituait pas un motif suffisant pour recommander la révocation, surtout lorsque la plainte est déposée par une personne qui n'a pas respecté les ordonnances de la cour et que, par ailleurs, le juge jouit d'une bonne réputation.

Plainte 26

Une plaignante, qui était employée dans un palais de justice, se plaignait de «harcèlement en milieu de travail». Elle prétendait qu'un juge, dans ses fonctions administratives, ne maîtrisait pas du tout son humeur et qu'il s'engageait dans des luttes personnelles contre quiconque s'opposait à lui.

On a informé la plaignante que le harcèlement en milieu de travail échappe à la compétence du Conseil parce que la surveillance du personnel de la cour incombe à la province. De même, elle a été avisée que sa plainte ne faisait pas ressortir d'abus du pouvoir judiciaire pour des avantages personnels, ni une conduite justifiant qu'on recommande la révocation du juge. On l'a avisée qu'elle devrait régler ses difficultés administratives en recourant aux mécanismes mis en place à son lieu de travail.

Plainte 27

Deux plaintes ont été déposées à la suite des commentaires qu'un juge a formulés au sujet du projet de loi fédéral sur le contrôle des armes à feu. Les plaignants soutenaient que le juge avait adressé une lettre ouverte au Premier ministre et au ministre de la Justice, et qu'il en avait ensuite envoyé des copies aux médias. Le juge s'était également prononcé contre le projet de loi dans le cadre d'entrevues accordées à Radio-Canada. Les plaignants soutenaient qu'il n'était pas approprié qu'un membre de la magistrature fasse de tels commentaires puisque cela minait sa capacité d'agir en toute impartialité et indépendance.

Le juge a défendu ses actions en expliquant qu'en l'absence d'une interdiction claire empêchant les juges d'exercer leur liberté d'expression, elles étaient mesurées et conformes aux lignes directrices du Conseil. Le plainte a été renvoyée à un sous-comité formé de cinq membres. Dans sa lettre au juge, le sous-comité conclut que les commentaires constituaient une attaque fortement partisane à l'encontre d'un projet de loi qui, s'il était sanctionné, lui sera peut-être soumis un jour pour interprétation et application. Toujours selon le sous-comité, une conduite appropriée ne se mesure pas uniquement en fonction de droits individuels stricts reconnus par la loi. Toutefois, le sous-comité a réprouvé fortement la conduite du juge parce qu'elle compromettait son impartialité; il conclut toutefois que, même si elle était regrettable, elle ne justifiait pas qu'on recommande la révocation.

Plainte 28

Un plaignant, qui était chef d'un syndicat, soutenait qu'un juge n'avait pas prononcé de décision dans une cause entendue «d'urgence» sept mois et demi plus tôt.

Dans ses commentaires, le juge a exposé les raisons du retard, signalant qu'il avait rendu les motifs de son jugement tout juste avant de recevoir la lettre du Conseil. Un sous-comité formé de trois membres a examiné la plainte et, même s'il a conclu qu'aucune mesure n'était justifiée, il a cité un cas semblable impliquant un autre juge où un sous-comité avait conclu qu'une enquête officielle devrait être déclenchée lorsqu'un juge néglige pendant une longue période de rendre plusieurs décisions. Le sous-comité a informé le juge qu'il ne souhaitait pas voir un problème de ce genre survenir dans son cas et lui a conseillé d'instaurer un système, avec l'aide de son juge en chef, lui permettant de se tenir le plus à jour possible. On a avisé le plaignant d'une résolution approuvée par le Conseil en 1985 suivant laquelle les jugements doivent être prononcés dans un délai de six mois après l'audience, à moins de circonstances spéciales. On lui a dit également qu'il est toujours regrettable qu'une décision urgente soit indûment retardée.

Plainte 29

Une plaignante, qui travaillait dans un bureau du greffier, soutenait qu'elle avait démissionné parce qu'elle ne pouvait plus endurer la violence verbale et la cruauté mentale dont elle était victime depuis trois ans aux mains d'un des juges du tribunal. Sa plainte était accompagnée de 40 pages de son journal intime et de notes de service dans lesquelles elle décrit les nombreux contacts offensants et injustes qu'elle a eus avec le juge.

Dans ses explications, le juge a précisé que la conduite de l'employée se détériorait depuis plusieurs années et que son comportement avec le public et les autres employés était devenu inacceptable et témoignait d'un manque de professionnalisme. Il a avoué avoir proféré des jurons à une occasion. Une enquête sur les faits a été effectuée par un avocat indépendant, et un sous-comité de trois membres a été constitué. Ce dernier a conclu que la conduite visée par la plainte, qui lui semblait très inusitée, n'entraînait pas un abus de la charge ou du pouvoir judiciaire ni un abus de pouvoir pour des motifs personnels. Le sous-comité a ajouté que ce genre d'inconduite, si tel était le cas,  relevait davantage du juge en chef de la cour que du Conseil. On a informé la plaignante que de telles plaintes devaient être portées à l'attention de son supérieur ou du juge, du juge principal de la région ou du juge en chef.

Plainte 30

Deux plaignants soutenaient qu'un juge avait fait preuve de racisme durant le procès criminel d'un policier accusé d'homicide involontaire pour avoir causé le décès d'un homme de race noire. Le premier plaignant prétendait que le juge a refusé d'écouter les arguments de la Couronne et ne cessait de discréditer les témoins de race noire. Il aurait usé d'un ton hostile et méprisable pour s'adresser à un groupe d'hommes noirs qui attendaient de comparaître comme témoins de la Couronne. La deuxième plainte, qui a été déposée par la mère de l'homme décédé, soutenait que le juge criait sans cesse contre le procureur, mais gardait son calme lorsqu'il s'adressait à l'avocat de la défense.

Le juge a nié avoir fait des remarques offensantes contre des Noirs durant le procès ou s'être mal comporté envers des témoins. Un sous-comité de trois membres chargé d'examiner la plainte a conclu, après une enquête et un examen des transcriptions de l'exposé de clôture de l'avocat de la défense, de l'exposé du juge au jury et des sections où le juge s'adressait aux témoins de la Couronne, que l'allégation d'inconduite n'était pas fondée. Des lettres détaillées exposant la réponse à chacune des allégations ont été envoyées à chaque plaignant.

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